Tant d’opéras se terminent par la mort tragique d’une soprano, mais la conclusion de La Bohème de Puccini ne manque jamais de me faire monter les larmes aux yeux.
Il s’agit déjà de la cinquième reprise de la production de Richard Jones en 2017 de cet opéra et la direction superbement sensible de Keri-Lynn Wilson de l’Orchestre de Covent Garden fait ressortir avec brio la puissance de la musique de Puccini.
L’intrigue est simple : un garçon rencontre une fille malade, ils tombent amoureux, la fille meurt, mais les émotions fortes de l’histoire sont mises en valeur de manière très efficace avec la joie imprudente de la première moitié cédant la place au désespoir alors que le désespoir s’installe.
Rodolfo (ténor albanais Saimir Pirgu) est un poète qui partage un grenier avec ses amis artistes Marcello (Mikhail Timoshenko), Colline (Alexander Köpeczi) et Schaunard (Hansung Yoo). Les trois derniers se dirigent vers le Café Momus, laissant Rodolfo terminer rapidement quelques travaux lorsque Mimi (Ruzan Mantashyan) frappe à la porte pour demander de la lumière pour sa bougie qui s’est éteinte dans le vent.
Ils tombent rapidement amoureux et le reste de la première moitié n’est que pure joie, renforcée par le comportement scandaleux de la petite amie de Marcello, Musetta (Lauren Fagan).
Le public de Covent Garden a vu pour la dernière fois Fagan dans le rôle de Gretel dans la production de Noël Hansel et Gretel, mais les singeries de Musetta enlevant les culottes au Café Momus sont glorieusement accomplies et étonnamment plus adultes.
Le rythme de l’opéra est grandement aidé par la scénographie de Stewart Laing qui permet de passer remarquablement rapidement de l’attaque des artistes à un boulevard parisien puis à l’intérieur du Café Momus. La rapidité avec laquelle tout se met en place élimine la nécessité d’un intervalle entre le premier et le deuxième acte, ce qui permet à l’élan du spectacle de se poursuivre sans interruption.
Tous les rôles principaux sont bien chantés, avec Ruzan Mantashyan (Mimi) et Lauren Fagan particulièrement excellents. Cependant, les voix des quatre artistes colocataires étaient parfois trop individuelles pour bien s’entendre. Saimir Pirgu en particulier avait une voix incroyablement forte, mais son volume élevé, presque implacable, était souvent inapproprié. En revanche, la scène finale de Ruzan Mantashyan était un bel exemple de la façon de chanter doucement mais avec suffisamment de puissance pour remplir l’immense Opéra.